[10/18]"Les racines déchirées"de Petina Gappah – Zimbabwe

Depuis le temps que j’en parle ! On ouvre la nouvelle année avec un tour d’horizon – un peu réduit – de la littérature africaine moderne. En effet, la visibilité des littératures afros a beau être très diversifiée, elle met parfois trop en avant la littérature afro-américaine sur la scène, fossilisant ainsi les littératures africaines dans les grands noms que l’on connaît – si tenter qu’on les connaisse un peu. Plus “intriguant” encore, c’est que l’Occident reste un tremplin indispensable pour tout auteur africain qui aimerait être connu à l’international. Le mois dernier, Le Monde s’enjaillait déjà sur cette nouvelle génération qualifiée d’auteur(e)s”Afropolitains“, et dont les récits étaient des creusés de leurs origines et de leurs voyages.

L’Afrique deviendrait-elle un peu moins ce bloc monolithique dans l’imaginaire occidental ? Chimamanda Adichie Ngozi est déjà la tête d’affiches du Nigéria, accompagnés d’autres auteur-e-s dont je vous parlerais prochainement ; mais avant qu’il ne soit question d’une littérature soudainement devenue “trendy” – ce que laissent penser les médias anglosaxons; il serait bon d’ouvrir nos horizons et de pallier à nos lacunes sur la singularité de ces pays.

A travers une sélection non-exhaustive – et toujours sujette à évoluer et à s’enrichir ! -, je vous propose de découvrir un pays, un livre (ou deux, quand je n’ai vraiment pas pu résister) !

On commence donc avec Les racines déchirées” de Petina Gappah, trouvé chez les éditions 10/18, un peu par hasard. L’auteure d’origine zimbabwéenne nous livre ici un recueil de nouvelles révélant les différents aspects du Zimbabwe lors de sa transition vers l’indépendance.

Autant vous dire que je ne suis pas très recueil de nouvelles à la base, je trouve souvent les nouvelles inégales entre elles, ce qui est assez frustrant quand on s’implique dans une histoire et qu’on la quitte pour une beaucoup plus ennuyeuse… Inutile de dire que j’ai été agréablement surprise !

La finesse du style de Petina Gappah est dans cette faculté à rendre cette atmosphère familiale avec cet humour cassant si propre aux tantines. J’ai beau ne pas être d’origine zimbabwéenne, il y a des images communes où l’on se retrouve à la place de ces enfants qui regardent les femmes rire entre elles pendant qu’elles coiffent.

Sans doute le sarcasme le plus délicieux est dans la critique de la politique zimbabwéenne lors de son accès à l’indépendance: dans le rapport entre les Blancs britanniques et les noirs Zimbabwéens, on retrouve les traces d’une sorte de Francafrique, la corruption,  la fascination des gens pour l’Occident, l’argent et l’ascencion sociale, la superstition et les forces qui dépassent l’entendement,jusqu’au mail-spam “vous avez gagne!  Venez chercher vos 20000€”. Chaque nouvelle s’ achève sur le retour du karma, qui semble se jouer des personnages !

J’ai beaucoup ri en lisant ce livre mais ce que j’ai particulièrement apprécié c’est la place faite aux femmes !  La veuve de l’ homme politique,  la femme stérile,  la fille qui doit se marier, la maîtresse,  la femme SDF, chacune apporte une réflexion sur la féminité, le statut sociale et la sexualité des femmes dans la culture zimbabwéenne. Derrière sa plume, Gappah livre une critique de la politique post-coloniale et aussi de la sensibilisation vis-à-vis du sida.

Son opinion tranché se ressent notamment dans son parti pris de ne pas traduire les quelques expressions en ndebele ou en shona, laissant aux lecteurs déduire ce qui se dit.

Pour qui ?

  • Pour celleux qui veulent rire de l’humour pinçant et l’ironie à l’africaine !
  • Pour celleux qui aimeraient découvrir la culture du Zimbabwe telle qu’elle était, et non”une littérature de voyage”.

 

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