Hello tout le monde.
Ca fait longtemps ! J’ai été peu présente ici, encore moins sur Twitter, mais j’ai eu le contrecoup d’une année très très chargée. Le deuil, la grossesse, la pandémie, le covid, les rendus, mon premier roman ado, mon quatrième album jeunesse, les premiers succès de l’Afrolab, la maternité, le déménagement, les séparations et les aléas, mon premier festival web pour le blog… Ca faisait beaucoup de montagnes russes, même pour 365 jours. Quand tout s’est enfin tassé, j’ai dormi, et j’ai commencé à ne rien faire. Ca m’a fait un bien fou. Je commence tout juste à reprendre la lecture, et j’ai réalisé à quel point cela m’avait manqué.
Depuis quelques temps – quelques années même – je repense beaucoup à ma vie étudiante, particulièrement les mois qui ont précédé la création de ce blog : énormément de lectures de livres, d’articles, de notes, de blogs, et cette impression d’avoir l’esprit en ébullition. A l’époque, il n’y avait pas d’enjeu. J’y repensais donc, et je n’arrêtais pas de me dire “ça me manque, je ne lis plus assez”. Je négocie souvent le fait d(écrire sur un sujet pour lire efficacement ce que je peux sur le sujet avec le temps libre que j’ai. Mais ce mode de lecture répond à des impératifs de production (écrire, corriger, poster, communiquer, échanger) qui en sont venus à me fatiguer, surtout en parallèle de tout ce que j’avais cette année. Et ce, même si ce n’était qu’un post de blog tous les mois ou les deux mois.
J’ai commencé à en parler à des femmes noires artistes de mon entourage, si c’était possible de se faire une parenthèse pour “créer et se ressourcer”, quand on n’a pas les impératifs du quotidien (le boulot, la famille, les ami.e.s), et tout particulièrement quand on est à son compte. J’ai eu des réponses passionnantes – qui peut-être feront l’objet d’un article plus tard – et surtout très ancrées dans les réalités d’aujourd’hui : les moments qu’on a pour créer sont évidemment soumis aux impératifs liés à nos conditions de survie. Pour autant, ce qu’on crée même au sein de nos stratégies de survie n’est pas de la “sous-création”, un préconçu qui a étrangement fait son chemin dans ma tête, ces derniers mois.
Pourtant, beaucoup de projets d’ouvrages que j’ai dans mes tiroirs ont été écrits dans le métro, le bus, les pauses déj’, pendant des années, et ce, bien avant que je sois à mon compte. Ce n’était pas optimal, et encore aujourd’hui, ça ne l’est pas vraiment, quand on sait qu’être à son compte implique de passer la moitié de son temps à faire en sorte que la machine tourne ! Néanmoins, si j’ai nourri cette nostalgie autour de mes lectures étudiantes et des articles qui en ont découlé par la suite, c’est parce qu’elles correspondent à un certain type d’articles que j’adorais faire. Bien foisonnant, voire fleuve, au point de devoir les couper en 3 ou 4 posts (les vrais savent). Aujourd’hui, il y en a… sauf que je les écris plus vite, plus efficacement, avec tout juste le temps de les apprécier.
Si j’ai gardé ce blog durant toutes ces années, c’est parce qu’il est encore comme une maison d’enfance, où j’aime retourner et partager des choses qui me tiennent à coeur, et qui peuvent aider mes soeurs noires. L’aiguille de ma boussole est cette volonté de proposer des contenus construits, quand je le veux et quand je le peux. J’ai aussi parlé de mon envie de proposer des contenus qui soient moins en réaction à l’actualité, aux réseaux sociaux, etc, ce que je pense avoir réussi à faire. Mais aujourd’hui, je sens que pour explorer davantage cette envie, il me faut plus de temps pour lire. Lire beaucoup. Non pas parce qu’il le faut, mais parce que j’en ai envie et que j’ai soif de curiosité. Et ça, c’est nouveau pour moi.
Quand j’ai commencé ce blog, j’avais la peur au ventre. Beaucoup de lectures que j’ai partagées ici découlaient, certes, de mes centres d’intérêt, mais aussi de la peur qu’on nie ma parole parce que j’avais fait une erreur, que je m’étais trompée, etc… Bref, la négation de la parole des femmes noires, vous connaissez déjà l’histoire. C’était une douce époque où chaque fois que tu affirmais publiquement, en tant que femme noire, quelque chose sur les violences racistes et misogynes que tu pouvais subir et les implications politiques que ça sous-tendait, on te répondait “Sources ?”. J’étais plus jeune aussi, vulnérable. Je me suis retrouvée à lire pour le plaisir, oui, mais aussi à annoter les pages “au cas où”. C’était un exercice qui s’est révélé passionnant, car j’ai beaucoup appris, mais aussi épuisant car il a phagocyté mon rapport à la lecture. Je n’étais pas toujours capable de savoir si je lisais un livre pour moi ou “au cas où”.
(Cela fera probablement écho à toutes les discussions sur la “perfection/performance militante” et la nécessité de connaître les grands textes, mais je parle d’une époque où Twitter n’était pas encore l’endroit où c’était “hype d’être intersectionnel” – pour le peu que ça puisse signifier, lol. Tout ce qui ne relevait pas des courants politiques dits “traditionnels” ou mainstream, était souvent accueilli avec violence et virulence, comme j’ai pu le raconter souvent ici).
J’ai donc pris la décision de lire autant que j’ai envie, en vacances ou pas, même si ça veut dire être moins sur Twitter, avoir le FOMO, ou mettre plus de temps entre les posts(haha, avouez-le, vous avez cru que c’était la fin). Et l’idée même de me consacrer à lire non seulement me fait du bien, mais m’anime de cette conviction que je reviendrais avec plein de choses à écrire ici !
Après, on ne change pas sa nature : vous savez bien que je ne résiste pas à commenter mes lectures du moment, et il y a des chances pour que vous trouviez mes reviews courtes sur Instagram, avant qu’elles n’arrivent ici. Ce point s’inscrit dans une décision plus large, sur différentes pans de ma vie… Et pour tout ce qui touche à ma casquette d’autrice, vous pouvez toujours me suivre sur Patreon et partager avec moi cette année charnière !
En commençant à écrire ce post, je n’avais pas d’autre but que de donner des nouvelles, et de vous annoncer la sortie de La demeure du ciel le 1er septembre chez Cambourakis, et de Nos Jours Brûlés, le 15 septembre chez Albin Michel Jeunesse…Comme quoi, on aura parlé de livres de bout en bout.
Portez-vous bien !