Ah lalalala, le mot qui picote, qui dérange, qui égratigne les égos et qui est synonyme de qualificatif extrême… Un peu comme tous les termes dénonçant les discriminations en vigueur. Voilà quelques jours que je regarde de loin (ou de près, dépend du degré discriminant du commentaire) la manière dont on veut absolument dédouaner le racisme quand il est sujet à interprétation. Je parle des Unes de journeaux, des oeuvres d’art, des films, des bonbons (tous ces exemples sont véridiques)… tout ce qui, lorsque l’on dénonce le racisme ou une autre discrimination, pousse inéluctablement à entendre “mais vous exagérez!” ou “je ne crois pas que leur intention était de”.
Je me propose donc de vous partager mon petit court de communication : lorsqu’un message est émis à un interlocuteur, ce ne sont pas les intentions qui priment, mais l’impact, la réception de ce dernier. L’impact peut changer selon la condition de l’interlocuteur, selon sa condition. Pour simplifier, l’impact sera amplifiée auprès des personnes qu’il concerne, ce qui est logique.
Et pourtant, beaucoup de non-concernés récepteurs s’efforcent de se focaliser sur les intentions artistiques, médiatiques, poétiques, abstraites en soit, appelant à un dédouanement systématique de l’impact. Ce à quoi je répondrais : cela explique mais ne justifie rien. Ce n’est pas parce qu’on énonce le processus que le résultat en est dissociable. Nop.
Mais à quoi donc est dû cette résistance à poser les mots tels qu’ils sont ? Pourquoi est-il gênant de dire qu’une chose, qu’une personne, qu’une parole est raciste/homophobe/etc ? Dans le cas du racisme, l’imaginaire collectif a ses préférences, ses tendances. Le racisme ne sera condamner par les dominants que s’il répond à un schéma bien précis : en effet, il sera plus confortable de qualifier de raciste un homme criant à sa victime “sale nègre/sale homophobe/etc” et donc de juger cet acte condamnable, qu’un objet ancré dans le quotidien (un bonbon, une boîte de chocolat en poudre…).
Quel est l’avantage de ce racisme préférentiel ? La bonne conscience : remplir une fois l’année son quotat de “ceci est raciste” permet de penser que l’on sait ce que c’est, que l’on est capable de l’identifier, que si l’on en est capable, on sait comment ne pas l’être nous-mêmes. C’est une petite case bien remplie qui permet de conserver son confort tout en se gardant de concevoir le racisme comme systématique et symptomatique. Ainsi, tout ce qui sort de ces schémas stéréotypés des discriminations semblent hors-cadre, et donc excessif.
C’est dans ce cadre excessif que sont barricadés les discriminés, premiers concernés tant par l’impact du message que par son aspect discriminant, et que l’on repousse, les empêchant de rentrer dans ce cadre bien ordonné avec ses schémas ancrés. On demande des preuves, des explications, de l’objectivité pouvant justifier en quoi ce cadre de l’imaginaire collectif est faux. Et ce, tout en oubliant fondamentalement que cet imaginaire n’a rien de légitime, et qu‘il est le produit d’une subjectivité dominante.
En général, la réduction d’une discrimination comme n’étant pas un système permet de le minimiser en des incidents isolés, liés au hasard, et enrichissant le gras de notre bon vieux “c’est comme ça, c’est la vie ! (haussement d’épaules)”.
Sur ce, je continue ma lecture de Why can’t we wait de MLK et je reviendrai peut-être avec une réflexion sur la parole des dominé(e)s.
P.S: si vous avez des objections, des commentaires, des points que vous voudriez ajouter à cette réflexion sans prétention, vous êtes bien sûr bienvenu(e)s ! 🙂